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Interview : Thérèse Devaux, militante pour la Palestine

 

N.B.   les astérisques (*), sur lesquelles vous pouvez cliquer, envoient à quelques explications

si nécessaire ou si vous le souhaitez. Elles ne sont nullement indispensables à votre lecture...

Bonjour Thérèse, peux-tu te présenter en quelques mots ?

 

Je suis habitante de Quetigny, depuis une trentaine d'années quand même, et je fais partie du Collectif 21 pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens. J'ai commencé à militer dans le cadre de ce groupe à partir du 7 octobre 2023, moment où le Hamas est sorti de Gaza pour attaquer Israël.

Auparavant, tu n'avais pas de préoccupation particulière... c'était vraiment l'événement déterminant ? 

Non, j'entendais comme tout un chacun ce qui se passait, c'est-à-dire pas grand'chose... J'ai entendu parler de la Nakba*, de Deir Yassin *, du massacre de Sabra et Chatila *, mais — assez égoïstement, je dois dire —, sans y attacher plus d'importance que ça. Et c'est vrai que l'attaque du Hamas * a été une déflagration... Je me suis dit : « Il y a un problème », et je me suis bien reconnue dans les paroles de Sarah Katz *, qui disait : « Gaza, ce camp de concentration à ciel ouvert » où les gens étaient enfermés depuis 2007.

 

Elle parle même, plus exactement, de camp de concentration "à ciel fermé".

Et c'est vrai, le ciel est fermé... On ne se demandait pas, à propos de Gaza, si ça allait exploser, mais juste quand.  Je me suis dit : « Mais oui », et ça a été une sorte de révélation, assez tardive... Et j'ai pensé : « Quelle survie, quelles conditions on offre aux Palestiniens ? ». Je me suis penchée un peu sur l'historique, depuis Theodor Herzl * à la fin du XIXème siècle, la déclaration Balfour *, l'occupation ottomane *, le mandat britannique *, etc. Et je me suis dit : « Jamais, à ce peuple, on n'a demandé son avis ! Il a toujours subi, il subit encore, et on cherche juste, maintenant, à l'éradiquer de la surface du globe... en arrachant toutes ses racines ! en tuant les gens, en détruisant les monuments... ». On parle d'historicide *, un mot qu'on a créé pour décrire cette situation... On détruit l'histoire, mais jusqu'au tréfond, jusqu'aux racines ; on arrache tout, on ne veut plus entendre parler de ce peuple. C'est complètement fou ! Et que disent nos gouvernements occidentaux ? Ben rien ! ça passe crème ! Et là, en tant que citoyenne, je me suis dit : « Il faut réagir » !

 

​​Les géographes ont créé, de la même façon, le terme "urbicide" *, dont nous avons parlé dans notre n° 31 à propos de Gaza...

On ne peut pas accepter ça ! Pierre Stambul * a dit : Si la Palestine perd, on perd tous ! Ça veut dire que la Cour pénale internationale, la Cour internationale de justice, l'O.N.U., hop, on passe tout ça par-dessus les bretelles, ça n'existe plus ! Et donc, qu'est- ce qui existe ? C'est la loi du plus fort, on est chez les cowboys... C'est celui qui a le plus gros pistolet qui dit : « C'est ma loi, c'est comme ça ! ». Eh bien, non ! On a quand même le droit international qui existe ! Le droit est fait pour défendre les faibles, il faut s'en servir et ne pas lâcher... Et ce genre de situation prend ses racines dans le colonialisme !

Tout à fait ! Le mot "colon" * a un sens banal (celui qui occupe une terre pour la travailler), mais peut être aussi tout à fait rattaché à l'histoire du colonialisme !

Et dans les années 70, je me rappelle, mes parents  qui étaient catholiques de gauche  avaient pour idéal le kibboutz... à cause du socialisme, de la vie en communauté, du partage, etc.  Eh bien, on était tous partis là-dedans ! Je me souviens, j'avais 14 ans, et je trouvais ça... ouaouh, quoi ! Bon, finalement, on n'est pas partis, parce que mes parents n'était pas juifs, parce qu'il avaient déjà 4 gamins, parce que c'était compliqué... mais c'était un idéal de société. Et à aucun moment, on n'avait imaginé... qu'il y avait là des Palestiniens !

Donc, y compris des gens d'un certain âge qu'on voit dans les manifs n'étaient pas, dans leur prime jeunesse, sensibilisés au sort de ce peuple !

 

Alors, pas du tout !

 

​Bon, il se trouve que tu es maintenant un peu... organisatrice de ce mouvement : on te voit beaucoup, à Dijon, pour toutes sortes d'activités. Qu'est-ce qui te paraît utile pour faire connaître la cause et pour... se rapprocher d'une solution ?

C'est ça qui est important ! Je dirai : tout ! c'est-à-dire interpeler les députés, les édiles, en disant : « on a voté pour vous (que ce soit Monsieur Pribetich, Madame Godard, Madame Hervieu), sur un programme qui tenait compte   quand même — de la situation à Gaza, et où ils·elles s'engageaient à intervenir à ce sujet... Eh bien, j'attends quelque chose !

On interpelle aussi les gens dans la rue quand on fait des rassemblements tous les samedis, avec une manifestation qui descend la rue de la Liberté une fois par mois, et on essaie aussi de prendre la population à témoin ; on organise dans la mesure du possible des sit-ins tous les soirs, parce que, face à la grosse machine de guerre des media "mainstream" qui défendent tout-à-fait la cause israélienne, il faut faire contre-poids ! Il faut montrer le drapeau palestinien pour que les gens puissent se dire : « hep ! Ça existe encore » ! Il y a aussi des pétitions, bien sûr, qu'on envoie aux député·e·s ; on s'adresse aux maires des communes où on vit. Il y a aussi une action très facile, que tout le monde peut faire, c'est l'action boycott, du mouvement B.D.S. (Boycott, Désinvestissement, Sanctions)... Et là, Carrefour, qui est très impliqué auprès des Israéliens...

​Alors, on sait que cette action existe, on sait que Carrefour est impliqué, mais tout le monde ne sait pas exactement pourquoi.

Eh bien, Carrefour s'installe dans les colonies israéliennes, qui prennent la place des villages palestiniens et pillent leurs ressources ; l'armée israélienne arme les colons... Carrefour a distribué des repas gratuits aux soldats israéliens, et n'est jamais revenu dessus ; alors, on boycotte... et ce sont des actions qui fonctionnent ! Les actions B.D.S. avaient commencé au moment où l'O.N.U. avait interpelé l'Afrique du Sud qui pratiquait l'apartheid... et ça avait fonctionné. En Jordanie, les citoyens ont décidé de ne plus aller dans les magasins Carrefour...et Carrefour a quitté la Jordanie ! Idem pour le sultanat d'Oman... et en Italie, il y un impact également.

En France, on a des chiffres pour juger de l'impact de ce mouvement ?

On entend dire qu'il y a un effet sur le chiffre d'affaires, mais je n'ai pas de données statistiques... Beaucoup de gens sont au courant, on essaie de tracter ; on a commencé à le faire une fois par mois, on essaie maintenant une fois par semaine de tracter devant Carrefour, que ce soit à Quetigny ou à la Toison d'Or... On interpelle les gens, et il y en a encore qui ne savent pas... Donc, c'est important d'en parler aussi sans cesse. Mais il n'y a pas que Carrefour ; il y a aussi McDo, Starbuck's, Sodastream, Reebok, Teva-pharmacie, BNP-Paribas... Mais, pour Dijon, en nous concentrant sur les deux gros hypermarchés, on s'est dit qu'on aurait plus d'efficacité (sans bien sûr dire qu'il ne faut pas boycotter les autres).

En ce qui concerne les manifs, par ex. celles du samedi, quelles sont les différentes catégories socio-professionnelles présentes ?

On a pas mal de Maghrébins, quelques Palestiniens (mais très peu, puisque quitter la Palestine est très difficile) ; des gens un peu comme nous, retraités ; des membres de divers partis et syndicats ; des jeunes (et de plus en plus !), ce qui nous encourage et nous fait dire que notre action a du sens : on peut compter sur ces jeunes pour maintenir la pression.  

Ces jeunes sont très présents, avec des drapeaux palestiniens... 

Oui, et on tient absolument à ces drapeaux ! Certaines personnes nous disent : « ils n'ont rien à faire ici, parce que ce n'est pas notre combat ! »... Eh bien, si ! On sait bien que ce régime colonialiste qui opprime les Palestiniens, c'est le même que celui qui attaque nos acquis sociaux, d'une façon très virulente ces derniers temps, avec Macron, Retailleau... L'idée, c'est un peu : « Quand on s'attaque à la Palestine, on s'attaque aussi un peu à nous ». Le Droit disparait : ce sont nos droits qui sont attaqués ! Tous les défenseurs des droits le disent : l'O.N.U., avec Francesca Albanese *, le dit ;  Amnesty International le dit, Human Rights Watch le dit. Tout le monde le dit, sauf... nos gouvernants. Le génocide, là-bas, est intolérable ! On dépasse de très loin les limites données par le droit international, on le piétine, carrément ! L'arraisonnement de la flottille *, dans les eaux internationales (ou même dans les eaux palestiniennes) est un acte de piraterie, tout simplement. Et que disent les autorités françaises ? Rien ! Ah, si ! que si elles veulent, les personnes arrêtées peuvent appeler le service d'urgence consulaire pour les Français en difficulté à l'étranger ! On attend quand même autre chose de notre gouvernement que ce "laissez faire"... On a l'impression que pour le régime génocidaire de Netanyahou, de Smotrich, de Ben-Gvir, c'est open bar : on peut faire ce qu'on veut ; les frontières d'Israël ne sont même pas définies ! On ne sait pas jusqu'où ils veulent aller : veulent-ils le Liban ? toute la "Grande Syrie" * ? un bout de l'Égypte, de l'Irak ? et l'Iran, maintenant (puisque ça commence à chauffer très fort de ce côté) ? Eh bien, ce qui peut donner une limite à tout ça, c'est l'action citoyenne. Et je pense que, même si le régime de Netanyahou dit qu'il va expulser les participants à la flottille et ne les mettra pas en prison — en fait, il semble que certains se retrouvent dans une prison connue pour ses traitements inhumains —, c'est aussi parce que la pression internationale (les opinions publiques commençant à être chauffées à blanc) s'exerce sur les gouvernements en Italie, aux Pays-Bas, en Espagne, au Portugal, en Irlande... qui commencent à dire : « ça suffit ! ». C'était déjà insupportable, mais maintenant que le génocide est avéré (Smotrich ne s'en cache même plus), on ne peut pas tolérer ça, d'un simple point de vue humain mais aussi au nom du droit international, qui doit rester notre phare, et que nous devons défendre à tout prix !

Les organisations participant au soutien des Palestinien·ne·s sont nombreuses... Comment se sont-elles agrégées pour une action commune, quelles peuvent être les éventuelles tensions à l'intérieur, comment le collectif maintient-il le cap ?

Dans le Collectif 21 pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens *, il y a au moins une trentaine d'organisations, comme Attac, la L.D.H., le MRAP, l'ARAC... ; des partis, L.F.I., le P.C.F... ; des syndicats, Solidaires, la C.G.T., la F.S.U., l'UNEF... ; l'U.J.F.P., l'A.F.P.S...

... et Réinventons Quetigny !

... et Réinventons Quetigny, bien sûr ! Ceux que je ne nomme pas m'excuseront... Notre but commun est d'obtenir la paix... et pas de paix sans justice, pas de justice sans résistance : il faut défendre nos acquis, on s'en rend compte de plus en plus : si on lâche, on nous piétine ! On fonctionne ensemble, et je crois pouvoir dire que le collectif 21 est la seule déclinaison locale du collectif national à fonctionner encore avec les organisations de départ ; parce que, c'est vrai, il y a des gens qui font en sorte de mettre un peu d'huile dans les rouages ; on essaie de fonctionner ensemble de façon démocratique. Ça ne va pas sans heurts, parce qu'il peut y avoir des tensions entre organisations ; on peut diverger sur le "comment agir" ; mais, bon an mal an, on arrive quand même à avoir une unité, et ça, c'est important. Et sur les buts, on est tous d'accord.

 

Sans doute n'y a-t-il pas eu de divergences majeures parce qu'il n'y a pas de forces palestiniennes radicales en Côte-d'Or...

C'est vrai. Pas de banlieues (ou plutôt des banlieues sous l'étouffoir), pas Urgence Palestine...

Sans doute aussi parce que ce sont des militants de base qui ont constitué le groupe ?

Il y a eu tout de même eu une modification dans le collectif. Au départ, il y avait des représentants des différentes organisations qui le composent, et petit à petit se sont intégrés des individus ; en toute légitimité, à mon sens (d'ailleurs, je suis membre d'Attac, mais je ne suis pas représentante d'Attac au sein du collectif) ; d'autres personnes, qui agissaient beaucoup dans l'organisation, avaient toute légitimité à participer aux réunions de préparation. Ça change, et c'est très bien, parce qu'un collectif, ça vit et ça évolue en fonction des événements, de la résolution ou non des problèmes, etc. Il n'y a pas une représentation officielle d'Urgence Palestine, mais il y a des gens très sympathisants d'Urgence Palestine. On fait attention à certains termes ». Par exemple, on n'utilise plus le mot "terrorisme" dans nos slogans , car ça peut être mal compris ; il est vrai que c'est une notion ambiguë... On est toujours le terroriste de quelqu'un ! Rappelons tout de même qu'en 39-45, les terroristes d'hier sont devenus les résistants d'aujourd'hui.

 

En tout cas, ça vous demande beaucoup de temps : quel est le rythme des réunions ?

Une par semaine, ce qui n'est pas rien !

​Et toi, tu es un peu la "personne ressource"... Tu as toujours sous la main des pinces à linge, des cordes, des sacs...

Oui, c'est mon côté pratique... C'est aussi mon côté "randonneuse".

​Tout autre question : que répondez-vous, d'une part à ceux qui vous accusent d'antisémitisme, d'autre part à ceux qui affirment que vous êtes aveugles face aux horreurs du Hamas ?

D'antisémitisme, sûrement pas ! Dans le collectif, on a aussi l'UJFP (Union Juive Française pour la Paix), l'Association France-Palestine-Solidarité, TSEDEK ! (collectif juif décolonial). Nous, on fonctionne pour un régime anti-apartheid...

N'empêche que dans la rue, lors des manifs, on entend des accusations...

 

​On confond beaucoumais je pense que le président de la République et les médias mainstream le font sciemment  antisionisme *  et antisémitisme * ! Mais ça marche de moins en moins, car on est très clair là-dessus : on est antisioniste parce qu'on est anticolonialiste, et on ne veut pas d'un régime sioniste, d'un État juif.

 

De toute façon, le terme "colon" dit bien ce qu'il veut dire...

​​

Oui, dans toutes ses acceptions.

 

Et sur la cécité face au Hamas ?

​​

On n'est absolument pas d'accord avec ce qui s'est passé le 7 octobre, évidemment. Mais sans l'excuser, on l'explique ! Ça a explosé, pourquoi ? parce que ça a été amené de façon très cynique par Israël, qui a donné de l'argent au Qatar pour financer le Hamas au détriment de l'O.L.P. de Yasser Arafat. Quand on nous dit : « Israël est la seule démocratie du Proche-Orient »... euh oui, alors, déjà, une démocratie qui pratique l'apartheid et qui est en train de commettre un génocide, je ne suis pas sûre qu'elle mérite le nom de démocratie ; et puis, le Hamas, il a quand même été élu en 2006 *  dans la bande de Gaza ! On est en train de dire, aussi, aux Palestiniens : « Attention, les gars, on n'est pas trop d'accord avec votre mouvement de résistance... ». Mais n'est-ce pas aussi une position très colonialiste ? On vous dit ce qu'il est bien ou mal de faire ; et, tacitement, tant qu'il ne se passait "rien" du côté du Hamas, avant le 7 octobre, ça coulait quand même... Il n'y avait pas de grands mouvements de populations. Beaucoup de gens ont commencé à réagir après, en disant : « Qu'est-ce qui se passe vraiment ?... ». Eh bien, un génocide ! On a eu beaucoup de mal à l'appeler ainsi, mais maintenant, c'est reconnu.

 

D'ailleurs, on sent bien la différence dans la rue !

 

En effet. Au début, quand on allait tracter une fois par mois avec l'AFPS rue de la Liberté, j'avoue qu'on se disait : "ça ne va pas être une partie de plaisir", "on va se faire rentrer dedans"... et maintenant, c'est le contraire ! Des gens nous prennent dans les bras en disant « merci ». L'opinion change... Il y a encore quelques irréductibles sionistes, mais ils n'ont pas d'arguments ; ils nous balancent quelques méchancetés en passant, mais ils ne s'arrêtent pas pour discuter. Idem pour nos élus : au départ, je me disais, "ho la la, ils sont plus intellectuels que moi, ils savent mieux se débrouiller au niveau des arguments, etc."... mais ils n'en ont pas, en fait ! Je me rends compte avec stupéfaction qu'ils n'en ont pas ! Ils nous disent : « Oh, ce n'est pas le moment ».... ah bon ? et je me dis « pour un génocide, c'est pas le moment non plus ! » ou : « Ça ne sert pas votre cause d'être là »... Ah bon ? « et si je reste dans mon canapé, ça servira mieux cette cause ? ». Ce n'est pas trop compliqué de leur répondre !

 

À propos des politiques, quand même... que penses-tu du fait que le drapeau palestinien ait été hissé à la mairie de Quetigny ?

​​

Ah, j'en pense vraiment du bien ! Je dis « Merci, bravo au maire de Quetigny ! ». Par contre, il a été affiché une seule journée... C'est sûr qu'il y avait des consignes de M. Retailleau pour ne pas les mettre. Rendons hommage aux maires qui l'ont fait (il y en a eu deux dans la région, Chenôve et Quetigny).

Besançon aussi...

 

En effet (je pensais à la Bourgogne sans la Franche-Comté)... En revanche, on entend un grand silence de la part de Madame Koenders... Pourtant, on voit depuis des mois le drapeau ukrainien ! et c'est très bien, il n'y a pas de souci... mais pourquoi pas aussi celui de la Palestine ? En tout cas, maintenant que Monsieur Macron a reconnu la Palestine en tant qu'État, est-ce qu'on a une excuse pour ne pas le faire ? Je ne sais pas !

Dans le même état d'esprit, la culture est une arme pour défendre la cause palestinienne, en un sens... Dans quelle mesure êtes-vous impliqué·e·s dans les manifestations culturelles de la métropole dijonnaise, par exemple à l'Eldo ?

Oui. On peut citer la campagne contre le ballet Batsheva : on a été tracter devant l'Auditorium pour exprimer notre désaccord sur la tenue de cette prestation, qui est là pour faire apparaître le côté très présentable d'Israël à l'étranger et fait "oublier" le génocide. Pour Israël, la culture est une belle vitrine ; nous faisons pression sur ces groupes pour qu'eux-mêmes fassent pression sur leurs gouvernements, ou "affichent la couleur", par exemple avec des drapeaux palestiniens... Avec ce type de manifestation, Israël se donne une belle image de marque...

Le festival du film palestinien de Dijon, que je tiens à mentionner, a lieu chaque année, mettant en lumière des films qui nous montrent la Palestine, comment vivent les gens là-bas, quel est leur vécu, quelles sont leurs réactions par rapport aux attaques israéliennes... Et là, je pense plus particulièrement au film No other land, de Yuval Abraham et Basel Adra.

 

Une petite question sur la flottille du 2 octobre... Qu'en attendais-tu ? Et puis, ta réaction sur le kidnapping de cette flotte ?

Quand on dit "paix, justice et résistance", pour le coup, la flottille est singulièrement un modèle de résistance, rassemblant plus d'une cinquantaine de bateaux, quasiment autant de nationalités différentes, avec des élus, des journalistes, des syndicalistes, de simples citoyens aussi, qui tiennent la place qu'on aimerait voir tenir par nos gouvernements, en disant STOP ! le génocide, ça ne doit pas exister ; la famine comme arme de guerre, c'est complètement illégal ; le blocus, c'est injustifiable !

Et puis, arraisonner la flottille dans des eaux internationales,  c'est juste un acte de piraterie ! À 200 km de Gaza, un bateau vient d'être intercepté sans aucune justification, avec des Français à bord. L'État français est responsable de de la sécurité de ses ressortissants... Alors, que font nos gouvernements ? On interpelle sans cesse nos élus, en faisant des pétitions, en nous déplaçant auprès de nos députés, en organisant de grosses manifestations à Paris... Qu'est-ce qu'ils attendent pour réagir ? et non seulement du point de vue humain, parce que c'est juste intolérable ! On ne peut pas voir mourir des enfants comme ça ! Les enfants, là-bas, rédigent leur testament ! et ce qu'ils demandent, c'est de ne pas mourir éparpillés en mille morceaux ! C'est fou, çà !

 

Alors, tu as parlé de grosses manifestations à Paris. Malheureusement, si on compare aux grandes capitales européennes, il n’y a pas de grandes manifestations à Paris. Il y a de petites manifestations à Paris. En Espagne, même en Allemagne, on compte plusieurs dizaines de milliers de personnes, on voit des photos de drones impressionnantes prises à Berlin...

 

En Australie, il y a eu des manifestations monstres aussi.

En Belgique aussi ; à Amsterdam aussi… Comment expliques-tu cette situation ?

 

J’ai un petit peu peur d’interpréter ce manque. Est-ce qu’il vient de nos organisations, de leurs têtes nationales incapables de s’entendre pour organiser une grande manifestation ? Auquel cas, c’est grave, c’est embêtant. Mais pour nous, l’important, c’est de faire notre rassemblement le samedi à 15 h place Darcy. Je me dis que globalement, ça tient, que les organisations sont là et qu’elles jouent le jeu. Certaines associations sont notre "plancher", notre socle commun minimal. On est soft et gentils, on n’embête pas la police, elle ne nous embête pas. Il y a une espèce d’accord tacite qui fait que ça se passe plutôt bien.

 

Pour le moment, on est surtout dans l’humanitaire, les droits de l’homme, le droit international. Au sein du Collectif, on n’aborde pratiquement pas les questions politiques : un État / deux États, le sionisme, l’expression «  de la Mer au Jourdain », le régime d’apartheid, le droit au retour du peuple palestinien de 1948... En fait, au sein du Collectif, le point de vue des Palestiniens n’est pas représenté...

 

Certains pays arabes soutiennent plus ou moins le plan Trump. Qu’en penses-tu ?

 

Les dirigeants arabes ont le cœur américain, ils ont été mis en place ou soutenus par l’Occident, et je ne suis pas sûr que leurs peuples les apprécient beaucoup. On l’a bien vu en juin dernier lors de la Marche mondiale pour Gaza qui devait traverser à pied la frontière entre l’Egypte et la Bande de Gaza. Il s’agissait d’une manifestation de civils venus du monde entier, non violente, pour protester contre le blocus israélien.  Un des membres, citoyen de notre Collectif, était d’ailleurs parti au Caire y participer. Dès l’aéroport, de nombreux contrôles ont tué dans l’œuf cette manifestation : un seul participant est arrivé au poste frontière de Rafah !

On pouvait croire que  venant du Maroc, traversant l’Algérie, la Tunisie, La Libye, cette Sumud Marche passerait... Eh bien, Arabes ou pas, la police égyptienne les a arrêtés, comme les autres, tout aussi brutalement. Les dirigeants arabes ne sont pas les peuples arabes. Ils roulent pour les USA et Israël, ils y ont des intérêts économiques, qui ne sont pas ceux de leurs peuples qui eux, sont très sensibilisés à la cause palestinienne. Par exemple, une anecdote : l’autre jour, à Carrefour Toison d’Or, où le Collectif menait une action pour le boycott de cette enseigne, un père de famille passait par là avec ses deux garçons. Il sort un billet de 200 euros qu’il me tend en m’expliquant qu’il est égyptien et solidaire de la Palestine...

Merci, Thérèse, et bon courage pour les actions à venir !

Notez dans vos agendas : manifestation nationale pour la Palestine à Paris prévue le 29 novembre !​ *

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