Plantons les poteaux de caténaires qui nous tiendront lieu de décor, et ouvrons sur la parole d’un Dijonnais pro-tram mais pas du tout convaincu par le tracé prévu dans le "projet", terme ronflant destiné à faire croire qu’on prend l’avis des usager·e·s, quand on se contente de dérouler le fil des obligations juridiques.
Ancien habitant de la métropole lyonnaise qu’il avait rejointe à son départ en retraite, il avait opté dans cette ville pour le "presque tout" transport en commun... mais il a bien vite dû y renoncer à son retour dans la capitale bourguignonne : d’une part, le réseau n’offrait pas une densité équivalente (ce qui est entendable vu la différence de taille des métropoles) et Talant, où il réside, est mal desservie (la question de la pente est un faux problème, c’est un choix politique) ; d’autre part, le choix tarifaire pour les aîné·e·s est "positivement" discriminant : on a supprimé la réduction pour l'ensemble des plus de 65 ans au profit d’une gratuité de 20 trajets mensuels sous conditions de ressources à plafond très bas ; c'est défendable sur le principe, mais dans les faits, l'impact est tout à fait contre-productif sur la fréquentation et la circulation. Il ne conduisait plus sa voiture à Lyon, il la reprend quasi exclusivement à Dijon. Après la lecture des articles sur la ligne T3 dans la revue de la Métropole, celle de la ville de Dijon et autres médias — devrions-nous dire "supports propagandistes" ? —, il s’est rendu au siège métropolitain, ravi à l’idée de consulter l’expo qui, d’après les indications recueillies, devait présenter les différents tracés prétendument envisagés par la — rappelons très très chère — étude à 1/2 million d’euros. Déception : l’exposition en question ne présente que quelques panneaux avec, en plus grand, les différents éléments qu’on retrouve dans les articles de presse que chacun a pu déjà parcourir maintes fois. Après demande, nous avons appris que l’étude en question n’est pas accessible publiquement, du moins par une démarche simple. On viendra ensuite nous bercer de grands discours sur la démocratie citoyenne… La conclusion de cet usager : « Expo sur le tram à Dijon métropole, deux panneaux et un classeur : je suis venu, j'ai vu et je ne suis pas convaincu ! Je ne viendrai pas à l’enterrement de la place Wilson, 1er mai, pont des tanneries, Transvaal, Voltaire, rue d’Auxonne... Il n y a aucune proposition pour un autre parcours, je suis déçu ».
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Intéressons-nous au départ Sud de la ligne T3 : le choix à été fait de l’ancrer au sein d’une zone commerciale qui tombe en désuétude après la fermeture du Géant Casino. Il aurait été probablement plus pertinent de prolonger l’actuel T2 à travers les quartiers Sud de Chenôve pour aller jusqu’à Marsannay puis se diriger vers l’extrémité de la partie commerciale où est prévu un parking relais (puisque l’objectif de capter les véhicules entrants est affiché, et cela est louable). Cela sera fait, avec le doublement en parallèle du T2 par le T3. On nous dit que la pénétrante (avenue Roland Carraz et avenue Jean Jaurès) sera embellie : certes, mais n'y a-t-il pas d'autres moyens d'arriver au même résultat ? Quant à l’obsession de sauver une zone commerciale morte alors que la métropole en comporte bien d'autres (dont "l’historique" de Quetigny ne fait guère l'objet de rénovations, alors qu’elle est la préférée des locaux, la Toison d’Or attirant plutôt des clients venus de plus loin), disons-le tout net : c’est du clientélisme !
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Passons à du positif, parce que quand même, il faut être équilibré ! Ce qui est très intéressant dans le tracé retenu est la desserte de nombreux établissements scolaires et la complétude du ceinturage de l’hyper-centre. La pacification de la circulation Transvaal-Carnot sera probablement très appréciée des cyclistes. Le principe de rejeter les circulations de véhicules en dehors de cet hyper- centre est, quant à lui, louable. Le renforcement d’une partie de la ligne T1 sur la zone campus universitaire - CHU sera bienvenue. La poursuite de la traversée des Grésilles — qui défrisera à coup sûr les bobos — est une excellente chose. Enfin, la desserte de Cap Nord sera profitable à coup sûr. Un petit effort aurait pu être fait pour opérer un "bouclage" et aller se raccorder sur la T2 au niveau du rond point de la Nation : le boulevard du Maréchal Joffre, droit et très large, s’y prête comme un gant !
Examinons maintenant la situation du tronçon Université-Quetigny. La construction à quinze millions d’euros de deux zones de stockage de rames supplémentaires à injecter sur le réseau aux heures de pointe, à Mazen-Sully et à Quetigny-La Parenthèse, semble disproportionnée au regard du service rendu. En effet, elles ne pourront être très fréquentes, car confrontées à la saturation de la cadence des rames sur le réseau (d’autant que la T3 viendra se combiner sur une partie du trajet jusqu’aux Grésilles). On connaît déjà à ce sujet les difficultés sur le tronçon commun boulevard de la Trémouille-Dijon-Gare. N’aurait-il pas été plus judicieux d’envisager de passer les rames de 5 à 7 modules, comme cela s’est fait dans d'autres métropoles (Strasbourg, Montpellier...) au fur et à mesure de la montée en puissance du trafic ? Pour cela, il aurait fallu anticiper... et prévoir des quais plus longs, comme Besançon l’a fait avec ses plateformes pouvant accueillir des rames "5 modules" alors qu’actuellement y circulent des "3 modules". Les modules supplémentaires coûtent évidemment moins cher que les nouvelles rames qui devront être acquises. On objectera qu’elles serviront à la T3, certes ; mais ces coûteuses voies d’injection, en attendant, ne seront que très faiblement amorties… Pour notre commune de Quetigny, une baisse de niveau de service est à craindre au profit d'un trafic plus élevé à partir de Mazen-Sully, et ce d’autant que la prolongation vers Chevigny-Saint-Sauveur n’a pas été retenue. Les deux éléments qui y ont présidé sont, soi-disant, le faible potentiel d’attractivité sur les territoires étudiés ("poche" d'usagers potentiels de seulement 5 900 personnes, contre plus de 12 000 pour d’autres), et en second lieu la prétendument trop importante durée pour rejoindre la gare depuis Chevigny via une prolongation de la T1 (à savoir 40 min). Cet argument est fallacieux : comme si la majorité des personnes prenant le tram allaient forcément en gare ! N’y a-t-il pas d’étudiants à Chevigny ? Ne prend-on le tram que pour quitter la métropole ? Ne va-t-on pas dans les zones commerciales ? au spectacle ? Il est également avancé que le maire serait d’accord pour la création ultérieure d’une "liane" à très haut niveau de service, en site propre… les habitant-e-s de Chevigny ont-ils été consultés à ce sujet, ou bien est-ce une tractation secrète du maire qui souhaite « sa » ligne directe ? Même avec des matériels roulants modernes et plus vertueux en termes d’émissions, ces fameux bus restent des bus et n’offrent ni le confort, ni l’attractivité du rail, nous l’avons déjà dit dans cette Lettre précédemment.
Alors, en conclusion, notre tram évolue et se renforce ; la future ligne T3 est dans l'ensemble une bonne chose, et elle desservira bien des endroits qui ne l’étaient pas et le méritent... Mais la méthode de réflexion et de construction du projet est entachée de beaucoup trop d’autoritarisme et manque de ce que pourtant une majorité de concitoyen·ne·s réclament pourtant de plus en plus : de la démocratie co-construite et participative. Il semble que le règne néoducal n’ait pas encore de fin envisagée et que les temps actuels de promotion ministérielle ne fassent que renforcer le caractère autoritaire du président métropolitain ! Nous avons toujours un tram dijonnais "nommé désir" car il en reste de nombreux, de désirs, à pousser pour qu’un réseau plus équilibré et gratuit (oui oui, c’est possible, et très important pour nous !) rayonne sur nos communes…
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Pour aller plus loin, quelques références :
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La place Wilson dans 5 ans, vue par actu.fr :
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Dossier de concertation préalable portant sur le projet de création d'une troisième ligne de tramway :
https://www.dijon.fr/wp-content/uploads/sites/24/2025/06/CONCERTATION-TRAM_DOSSIER_2025.pdf
Capatram* : travaux pour renforcer le service tram :
https://www.dijon-metropole.fr/actualites/capatram-travaux-pour-renforcer-le-service-tram/
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