
"L'Étouffoir" prend forme...
Au sein de notre petit collectif, nous avons pris l’habitude d’appeler ainsi ce que la mairie nomme le « Cœur de ville ». Il y a là, de notre part, un peu de mauvais esprit… mais, jusqu’à preuve du contraire *, on a plutôt affaire à un entassement de parallélépipèdes disgracieux autant qu’hétéroclites jouant à touche-touche les uns avec les autres !
Comment cela a-t-il été possible ? Les successeurs de Roger Rémond et d’Hervé Vouillot ont voulu appliquer à notre ville le principe de la « densification des centres », qui n’est pas, en soi, absurde : bien conçue, celle-ci peut limiter l’artificialisation des sols, contenir le besoin d’investissements publics, économiser des kilomètres de flux de toute sorte, amoindrir le prix des logements, réduire les coûts et les temps de transport... Le tram — dont nous saluons la réalisation — a été un bon prétexte pour étudier les voies et moyens d’une rationalisation de l’espace qui n’était évidemment pas incompatible avec le souci de l’environnement et du vivre ensemble.
Mais, dans le cas de Quetigny, il a manqué, contrairement ce qui s’était passé jusqu’à l’an 2000, une cohérence et une vision. Notre commune disposait, au départ d’Hervé Vouillot, d’un « matelas » financier confortable qui autorisait ces ambitions. La municipalité, avec comme grand ordonnateur des dépenses la SEMAAD (future SPLAAD), s’est alors appuyée (pour ne pas dire reposée) sur des "experts" parfaitement formatés, aux idées simples, adeptes de sondages "bien orientés" auprès des habitants mais ne se sentant pas du tout obligés d’en appliquer les résultats...
Plusieurs promoteurs ont été invités à apporter leur béton aux édifices.
La ville, aujourd'hui accablée par l'endettement, a en partie perdu la possibilité de planifier sur le long terme un urbanisme respectueux des nouvelles priorités environnementales et sociales.
Nous avons déjà dit tout le mal que nous pensons de la place Centrale, fournaise en été, grisaille en hiver ; nous vous reportons aux liens ci-dessous… Intéressons-nous aujourd’hui à ce qui vient d'être achevé ou reste en cours de construction.
Notre constat ? des cotes mal taillées : médiathèque et logements dans le même immeuble, distance insuffisante (aussi bien entre bâtiments anciens et nouveaux qu'entre les bâtiments en cours de construction), prix des appartements prohibitifs expliquant la quasi-absence de familles avec enfants, alors que cet argument était utilisé par la mairie pour justifier le projet. En cause, la fameuse loi Pinel, qui permet à des personnes aux revenus élevés d'acheter des appartements en bénéficiant de réductions d'impôts, puis de les louer pour s'assurer des revenus confortables (par exemple en co-location étudiante). Cette loi injuste conduit à détourner la politique de construction de logements au profit de l'enrichissement de particuliers. Et cela montre aussi qu'il est dommage que la Ville de Quetigny ait renoncé à envisager la construction de logements pour jeunes et précaires, avec d'autres partenaires, comme nous l'avions suggéré.
Les Quetignois n'ont jamais pu donner un avis fondé sur les réalités concrètes de ce programme de constructions. On n’a même pas eu droit, avant le commencement des travaux, à une maquette, jugée trop coûteuse (tout au plus quelques milliers d’euros, une goutte d'eau dans l'océan des dépenses totales : plus de 25 millions !) ; il a été cependant possible d'éditer pour la mairie un document de propagande "en 3D" (https://www.youtube.com/watch?v=9cw80YRWeM8) à l'époque (2016) tellement alléchant à force d’images idylliques et paradisiaques, accompagnées de termes technocrato-bucoliques ("balcon résidentiel", "parc habité", "aménagements paysagers" et "jardins paysagés" [nuance !], "placette de quartier", "espaces extérieurs généreux et de qualité"...) qu’il nous fait rire (jaune) aujourd’hui.
Ces quelques photos confrontent le projet affiché en 2016 et l’état actuel du chantier :
Vous avez constaté que le "marché forain" de la place Roger Rémond n'a jamais accueilli aussi peu de clients (donc de commerçants) que depuis les travaux... Étonnant pour une place qui devait "faciliter la dynamisation économique du cœur de ville" ! (dixit la SPLAAD).
À noter : ce que la vidéo appelle "pavillon commercial" est devenu le hardi polyèdre de la brasserie Quetign'eat ; nous souhaitions plutôt l'ouverture d'un restaurant offrant davantage d'originalité et de convivialité (par ex. une auberge grecque associative), avec une architecture un peu plus simple et un peu moins austère ; mais bon, l'établissement est de qualité et assez animé...
Quant à la "façade aveugle" que constituait le mur ouest de Casino et qui devait accueillir de nouveaux commerces (la vidéo nous parle d'un "nouveau vis-à-vis commercial"), elle est devenue borgne, puisque seule une petite ouverture a été pratiquée dans un recoin pour accueillir la nouvelle Poste !
On remarquera aussi que l'immeuble le plus mal placé, celui coincé entre le parking à l'est de Casino et la très passante rue du stade, a été celui choisi pour y installer les logements sociaux imposés par la loi pour tout projet immobilier...
Le "bâtiment signal" (tour de 7 étages à la place de l'ancienne Poste) n'est pas encore construit ; attendons de voir s'il jouera le rôle de "nouveau skyline identitaire" [sic] qui lui est dévolu... Nous sommes impatients : Quetigny deviendra-t-il New-York-sur-Cromois ?
Un petit mot de l'Arlésienne de Quetigny (celle dont on parle depuis des années mais qu'on ne voit jamais) : les toilettes publiques, qui avaient leur place dès l'origine dans le plan du "pôle mobilité" au nord du terminus du tram, et qui seront finalement le "petit recoin" communal de ce bâtiment métropolitain, destiné pour l'essentiel aux agents Divia et à une station de vélos (tout à fait bienvenue pour un terminus de ligne, d'ailleurs). Plus qu'un ou deux ans à attendre, courage ! Lors de la présentation du projet en commission municipale, il nous a été dit que le tarif pour ses usagers n'était pas encore fixé... Nous avons été quelques-uns à dire : « et pourquoi pas la gratuité ? ». Cette délicate question reste en suspens ! Les toilettes publiques du centre de Dijon sont gratuites, et, si l'on veut éviter les incivilités, il nous semble qu'il faut ouvrir ce service à toutes et à tous.
Venons-en aux constructions récentes, celles du "Parc Habité" :
Le sort infligé à la ferme Bruley (dite aussi Cottenet) est révélateur de cet urbanisme de Gribouille.
Elle aurait dû être dès le départ au cœur du projet, en tant qu'élément — non sans allure et non sans charme — du patrimoine rural de Quetigny. Notre programme de 2020 prévoyait d'y installer une petite salle de spectacles. L'équipe municipale, elle, avait envisagé à l'origine un lieu animé (par des métiers de bouche ?). Elle nous affirme maintenant que cela aurait coûté trop cher... Et si on avait enlevé quelques pourcents à la bétonisation de la place centrale, si accueillante comme le montrent les photos ci-dessus) ?
Nous apprenons, alors que la ferme est déjà cernée de tous côtés par les chantiers, que la mairie travaille sur un projet de bâtiment (gardant ses façades de pierre) destiné à abriter des professions para-médicales, dont une sage-femme... Un équipement de santé, OK ; au service des habitants, particulièrement des femmes, OK. Mais il s'agira malheureusement (en un temps où de nombreuses municipalités financent des maisons médicales) d'un projet privé.
Un architecte spécialisé dans la réhabilitation des bâtiments agricoles travaille sur le projet ; il propose, en gardant le corps de ferme, une architecture intérieure à deux ou trois niveaux, ainsi que l'ajout d'une verrière et d'éléments métalliques (en aluminium)... Conformément à la loi, il prévoit une entrée pour les patient·e·s et une autre pour le corps médical et para-médical. L’architecture originale sera-t-elle valorisée ou dénaturée ?
Par ailleurs, on ne pourra juger de l'opportunité de ce projet que lorsque nous saurons qui deviendra propriétaire et dans quelles conditions se fera la vente. Nous avons été échaudés, ces dernières années, par des transactions manquant de transparence... Quelles autres professions paramédicales seront représentées ? Quelles personnes les exerceront ? Quelles complémentarités seront établies avec les autres professions de santé dans la ville ?
Mais l'essentiel est sauvé : la ferme Bruley, nous affirme la vidéo, est "mise en perspective"... Ouf !
Nous disions en 2018 à propos de ce nouveau quartier : "Il aurait pu être conçu autrement, avec deux fois moins de logements, préservant quelques espaces libres permettant aux riverains de respirer. Le résultat risque de renforcer l’image d’une ville dortoir perdant peu à peu son identité verte pour devenir un simple quartier densifié de la Métropole". Avions-nous tort ?
Et quand l'Étouffoir sera terminé, on sera déjà reparti pour un tour : au-delà de la ferme Bruley, le long de l’avenue du Cromois, on a déjà mis en route les bulldozers, puis monté des grues. On est bien parti pour y retrouver le même type d’urbanisme, celui où les promoteurs font la loi…
* On peut toujours espérer qu’une fois le chantier terminé, nous découvrirons de nouveaux horizons... Nous vous présenterons une nouvelle série de photos quand le quartier aura sa physionomie définitive, promis !
Pour compléter votre information :
Le Cœur de ville vu par la SPLAAD :
Le Cœur de ville présenté aujourd'hui par la municipalité :
https://www.quetigny.fr/projet-coeur-de-ville
Quelques articles publiés durant le précédent mandat par notre collectif sur le projet :
novembre 2014 : https://www.reinventonsquetigny.com/_files/ugd/f33f2f_c9909738f0c04fe68657f423d1f933dd.pdf (p. 2)
mars 2015 : https://www.reinventonsquetigny.com/_files/ugd/f33f2f_ec4b60ba726f4ca69892dc12986be0f7.pdf (p. 2)
novembre 2015 : https://www.reinventonsquetigny.com/_files/ugd/f33f2f_0d4fd86287d2452297fc6acb6a7d0ca6.pdf (p. 1)
avril 2017 : https://www.reinventonsquetigny.com/_files/ugd/f33f2f_85c3a0d5327b4f6b8175e91a1da2cc4b.pdf (p. 2)
février 2019 : https://www.reinventonsquetigny.com/_files/ugd/f33f2f_34fc44e55ac941de8e6fea041c40e269.pdf (p. 3)
juin 2019 : https://www.reinventonsquetigny.com/_files/ugd/f33f2f_8eabcee98fbe4a6e8a8cc4859eb2015a.pdf (4 pages)
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