
Il faut plus que jamais soutenir l'Ukraine !
Nous vous parlons depuis plus de trois ans de la guerre d'agression menée par la Russie de Poutine contre son pacifique et démocratique voisin... mais, depuis plus de trois ans, elle se poursuit, en violation de toutes les règles internationales, et, depuis quelques semaines, semble changer de dimensions, alors même que l'opinion internationale tourne son regard vers le Moyen-Orient. Pourquoi est-il plus que jamais nécessaire de s'y opposer ?
L'opération "toile d'araignée" : une humiliation pour Moscou
Dans la nuit du 31 mai au 1er juin, les forces ukrainiennes ont surpris le monde, réussissant à causer l'effondrement de deux ponts ferroviaires dans les régions de Briansk et de Koursk (à une centaine de kilomètres de la frontière), et surtout à détruire sur leurs bases des "vecteurs stratégiques" russes (avions bombardiers Tu-95MS, capables de porter des missiles nucléaires, utilisés aussi pour bombarder les villes ukrainiennes) à Irkoutsk, au cœur du territoire russe, à près de 5 000 km de la frontière ! Cette riposte "du faible au fort" a été rendue possible par l'envoi, pendant un an et demi, de 150 drones répartis par les services secrets ukrainiens à bord de remorques de poids lourds russes, à l’insu des chauffeurs... ce qui a rendu inopérante la défense anti-aérienne ! Au moment voulu, les drones, commandés à distance, sont sortis des camions. Cinq aérodromes militaires étaient visés par cette "opération Toile d'araignée" ; quatre ont été attaqués simultanément ; l'explosion d'un camion a empêché d'attaquer le cinquième.
Les media ukrainiens se sont un peu emballés : pour le journaliste Youri Boutoussov, l’opération, « n'ayant à un tel niveau technologique aucun analogue dans le monde », va avoir « un effet colossal sur le plan militaire et économique ». Sans aller aussi loin, on peut comprendre l'espoir suscité par ce coup de maître dans la population ukrainienne. Poutine, humilié, a tenté de riposter en paroles, déclarant : « ces frappes du régime terroriste de Kiev visent à saboter les pourparlers de paix à Istanbul ». Piètre argumentation !
Cet incontestable succès militaire n'est pas exempt de dangers : de fait, Zelensky a sans doute cherché à convaincre Trump qu'il n'était pas vain d'aider l'Ukraine... Mais, si Kiev a voulu démontrer que la Russie n’est pas protégée par sa dissuasion nucléaire (puisque des bases "sanctuarisées" ont été attaquées), une escalade de Poutine contre une plus grande partie de l'Ukraine, voire contre des intérêts occidentaux autres qu'ukrainiens, pourrait finalement entraîner l’OTAN dans une guerre directe avec Moscou. Significativement, Trump a qualifié l’attaque de « stupide » dans l'entretien qu'il a eu avec Zelensky dans les heures qui ont suivi l'attaque...
Une riposte sanglante
Moscou a présenté à Istanbul, où se tiennent des négociations de paix, un "mémorandum" de nature à refroidir les enthousiasmes ukrainiens : il propose deux options pour parvenir à un cessez-le-feu : la première impose à l’Ukraine de retirer ses troupes des quatre régions annexées par la Russie ; la seconde impose un gel militaire : interdiction de déplacer les troupes, arrêt de la mobilisation et des livraisons d’armes occidentales, retrait total des forces étrangères du territoire ukrainien, organisation d’élections, présidentielle et législatives, dans les 100 jours suivant la levée de la loi martiale. Pour le "règlement définitif” du conflit, Moscou exige “la levée des sanctions, l’abandon de toute demande de réparation pour les dégâts de guerre, le rétablissement des relations bilatérales”, la reconnaissance du russe comme langue officielle et la garantie des droits de la population russophone. Mémorandum léonin, évidemment inacceptable !
Illustration de la détermination russe à punir l'Ukraine pour l'humiliation subie, Kharkiv, grande ville du Nord-Est (1,4 million d'habitants avant la guerre), a subi dans la nuit du 6 au 7 juin (voir photo) l’attaque la plus puissante depuis le début du conflit en février 2022 (452 drones et 45 missiles), prélude d’une vaste offensive. Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Andriy Sybiha, demande à la communauté internationale d’augmenter la “pression sur la Russie” pour mettre fin à “la terreur contre les civils”. Les pourparlers de paix ont été suspendus.
Le 8 juin, l'armée russe a mené une nouvelle offensive dans la région ukrainienne de Dnipropetrovsk, dans l'est du pays, ville-refuge pour les civils chassées des provinces orientales après l'assaut initial des troupes russes.. Si elle est régulièrement visée par des frappes aériennes, c'est la première fois que des soldats russes y entrent en plus de trois ans de conflit. Jusqu'où cette escalade va-t-elle mener ?
Poutine garde la main
Ces attaques marquent un nouveau revers pour les forces ukrainiennes, en difficulté sur le front, faute d'hommes et d'armements. Au-delà de l'aspect symbolique, cette avancée des troupes de Moscou pourrait bien avoir une valeur stratégique sur le terrain, en pleines discussions diplomatiques pour un règlement du conflit dont Trump voudrait bien s'attribuer le succès !
Il s'agit aussi de décourager les soutiens "occidentaux" à l'Ukraine... Plusieurs voix s'élèvent aujourd'hui pour déplorer que l'Europe n'ait pas réagi assez tôt à l'agression russe, freinée en particulier par l'ancien chancelier allemand Scholz. Certes, l'Europe aide... mais toujours trop tard et toujours trop peu ! Quant aux pourparlers de paix auxquels participe Moscou, ils ne servent guère qu'à faire plaisir à Trump... Celui-ci n'a réagi que par un petit tweet aux massacres du 8 juin.
À l'heure où la France s'est engagée à faire produire par Renault des drones sur le sol ukrainien, l'une des évolutions inquiétantes pour ce pays agressé depuis plus de trois ans est la contamination de plusieurs pays européens par le trumpisme, qui risque de les éloigner du soutien à l'Ukraine ; certes, le soutien de la Pologne lui est actuellement maintenu en dépit de la victoire de Karol Nawrocki, car le Premier ministre Donald Tusk reste maître de la politique étrangère et le président nouvellement élu n'a pas assez de voix à la Diète pour lui opposer un veto ; mais la Roumanie a vacillé au moment de l'élection l'an dernier de George Simion, heureusement invalidé et remplacé par Nicușor Dan le 18 mai ; Robert Fico, en Slovaquie, mène une politique ambiguë à l'égard de Moscou ; Viktor Orban, en Hongrie, qui se positionne contre le soutien militaire à l’Ukraine, sort renforcé des scrutins récents. Les Pays-Bas semblent chanceler, menacés par une possible victoire de Geert Wilders, chef du parti d’extrême droite néerlandais PVV, et l'Italie de Giorgia Meloni se garde bien de critiquer Poutine pour ne pas déplaire à Trump...
Les grandes puissances se désintéressent de l'Ukraine. Trump, en particulier, n'a pas assez de matière grise pour traiter plusieurs sujets à la fois, et consacre toute son énergie à épauler les projets meurtriers de Netanyahou. Détermination chez les vrais amis de l'Ukraine, mais aussi prise de conscience des risques que la poursuite du conflit pourrait bientôt entraîner pour l'ensemble de notre continent, sont plus que jamais indispensables. Agissons dans l'unité pour mettre fin à l'insupportable guerre d'agression menée par la Russie !